Enseignement et vocation: l’art de jouer avec les mots
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** Ce texte sur le concept de vocation en éducation est une collaboration de M. Goldrick Noel, enseignant au primaire et collaborateur pour le blogue Espaceprof **
Nous sommes en plein milieu d’une ère où le vocabulaire est de plus en plus important, où le choix des mots est plus important que l’intention. Je vous propose donc un nouvel ajustement.
“L’enseignement est une vocation.”
Vocation vient du latin “vocare” qui veut dire “appeler”. Dans le monde religieux, on considère la vocation comme étant l’appel d’un Dieu. La voix à suivre pour garder la foi et s’engager dans une vie religieuse.
Bon, on ne se le cachera pas, bien que ce soit un mot à saveur religieuse, il est souvent utilisé dans d’autres domaines dont la vie humanitaire.
L’ajustement que je vous propose est de ne plus utiliser le mot vocation pour parler d’enseignement.
“On l’a déjà entendu la cassette…”
Ok, mais je vous propose un autre angle de vue.
Lorsqu’on parle de vocation, on associe plusieurs caractéristiques au mot qui l’accompagne. On peut entre autres parler d’abandon de soi, de don de soi et de reconnaissance des exigences. Et ça nous suit même quand on ne veut plus entendre parler de vocation.
On a tous entendu parler de l’histoire de l’enseignante qui a une classe difficile et qui essaye encore et encore de faire sa tâche avec le peu de ressources disponibles. Mais trop souvent, on laisse passer sous silence les combats qu’elle a mené pour avoir plus d’aide. De l’aide pour elle. De l’aide pour ses élèves.
On n’en parle pas, parce qu’une enseignante qui a la vocation, ça ne se bat pas. Ça se soumet aux conditions dans lesquelles elle travaille. Quand on parle de vocation, juste l’idée d’une enseignante qui se bat semble ridicule. Se battre contre qui? Avec quoi?
On connaît aussi l’histoire de l’enseignante qui ne compte plus ses heures parce que… bien… parce que tout le monde le fait, parce que c’est ça le travail d’une enseignante, parce qu’on lui a dit dès l’université de se préparer à cette réalité. Cette enseignante qui a la vocation est prête à se donner corps et âme pour ses élèves.
Parfois, elle le fait au prix de sa santé mentale parce qu’une enseignante qui est en arrêt de travail, c’est une héroïne qui a tout donné. On admire toute la splendeur de leur vocation et on se dit qu’on ne serait pas capable de faire comme elle.
Et c’est là que vient la reconnaissance des exigences du métier.
Quand on félicite une enseignante qui a la vocation, on ne la félicite pas pour son bon travail. On la félicite parce que ce qu’elle fait c’est très difficile.
On la félicite parce qu’on a essayé pendant une semaine avec notre enfant et on imagine pas à quel point c’est un immense défi d’affronter 30 enfants qui ne nous appartiennent pas. Cette enseignante a la vocation parce que ce qu’elle fait est difficile à reproduire.
Ça c’est l’envers de la médaille. La partie qu’on ne voit pas derrière ce mot si honorable qu’est la vocation. Les enseignantes n’ont pas de vocation. Elles ne suivent pas une voix intérieure qui les soumet et les pousse à se donner à fond tout en faisant des prouesses qui attirent des “Bravo!”.
Les enseignantes sont des professionnelles de l’éducation qui envoient régulièrement des messages au gouvernement pour qu’on oublie pas que le réseau est à court de miracles. Ce sont des diplômées universitaires qui en font plus que nécessaire parce que ce sont des personnes ambitieuses qui ont à coeur le futur de nos enfants.
Elles sont merveilleusement douées dans ce qu’elles font parce que ce sont des professionnelles qui ont dû vivre le défi que représentent les stages afin de prouver qu’elles maîtrisent une multitude de compétences.
Bref, être une enseignante c’est bien plus qu’un appel. C’est un choix professionnel afin de contribuer au développement des citoyens de demain.
– Goldrick Noel, enseignant au primaire que vous pouvez également retrouver au http://www.espaceprof.com/
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