Les réactionnaires québécois
Vous avez sans doute vu ou entendu parler des publicités atrocement malaisantes du gouvernement québécois censé être contre le racisme et les préjugés. C’est sans doute la pire campagne de communication que j’ai eu la chance (ou malchance) de voir.
Elles ont également été détournées à toutes les sauces sur les réseaux sociaux (avec raison).
Donc, suite à la lecture de plusieurs textes dans les journaux depuis quelques jours, j’ai une petite dérivée de mon cru pour vous :
Comment on appelle quelqu’un qui s’insurge plus sur un mot “iel” et l’utilisation du mot en N. que sur les changements climatiques, le racisme, l’évasion fiscale, la fraude, l’augmentation des inégalités de richesse et autres vrais problèmes de la société ?
Un réactionnaire québécois.
Et à voir les multiples chroniques et réactions un peu partout dans les médias, ils sont nombreux.
Ce commentaire a été laissé sous la publication du journal Le Devoir, suite à une chronique très douteuse de Christian Rioux.
J’ai longtemps cru que ce genre d’éditorialistes ou de chroniqueurs était réservé à la famille Québecor Média.
Que ce soit dans le Journal de Montréal ou à TVA Nouvelles, ils en ont fait leur marque de commerce depuis longtemps. Même chose pour une certaine station de radio de la vieille capitale qui en a fait sa marque de commerce.
Je n’ai pas besoin de nommer de noms, vous les connaissez déjà pas mal tous j’en suis convaincu (surtout si vous me suivez depuis un bout).
Mais constatant que c’est une recette qui fonctionne, qui amène des clics et ultimement des revenus, cette recette de l’éditorial incendiaire est maintenant monnaie courante dans les autres médias du Québec, comme Le Devoir et La Presse.
Malheureusement, ces réactionnaires québécois ne semblent pas avoir le même sens des priorités que plusieurs d’entre nous.
Pendant qu’on déchire notre chemise sur l’ajout d’un mot de 3 lettres dans le dictionnaire, sur le droit d’utiliser un mot raciste en N, sur le français pas assez appris vite de la nouvelle gouverneure générale ou autres enjeux qui sont à mon avis drôlement secondaires, c’est le silence radio sur de gros dossiers aux impacts beaucoup plus importants.
Le meilleur exemple ?
Les Pandora Papers.
On apprenait via l’émission Enquête à Radio-Canada que des milliards de milliards de dollars sont cachés légalement dans des paradis fiscaux aux quatre coins de la planète.
Un vrai scandale, une vraie cause de révolte et de manifestations dans les rues.
Et pourtant ?
Le lendemain, la nouvelle était morte. Nos réactionnaires québécois n’ont pas été inspiré par cette nouvelle.
Ça rapporte pas assez de clics de parler de vrais problèmes qui nuisent grandement à la société.
Même chose pour les changements climatiques.
Et pourtant, ce ne sont pas les exemples concrets qui manquent depuis quelques mois.
On nous montre les images de destruction, on nous vend le sensationalisme, mais en aucun cas on n’écrit ou ne s’insurge sur le fait que ce sont des conséquences réelles des changements climatiques.
Que leurs conséquences commencent déjà à se faire sentir.
Mais bon, ça ne provoque pas assez la réaction et la division de la population. Car la recette du profit est ici. Plus il y a de réactions et de conflits sur les médias sociaux, plus l’algorithme Facebook partage la publication et plus les clics sont importants.
Plus de clics = plus de revenus publicitaires.
C’est une recette simple et efficace.
Mais il y a aussi une ironie marquante au moment ou j’écris ces lignes. Pendant que je m’insurge sur ce genre de sujet, je fais exactement la même chose que ceux que je dénonce.
J’aurai pu passer ce temps à écrire sur les mêmes sujets que j’ai énumérés plus haut. Mais je sais fort bien qu’ils ne seront pas autant consultés que de répondre à une chronique réactionnaire. Et que je vais avoir beaucoup moins de plaisir à le faire.
Je dois donc être honnête avec vous et avec moi-même.
Je suis un « contre-réactionnaire québécois ».
– Jonathan « le Prof » St-Pierre